L’Association des Femmes et Filles violées du 28 septembre 2009 (AFFV) a tenu une conférence de presse à la Maison de la Presse de Conakry ce samedi 28 septembre 2024, marquant le 15e anniversaire des massacres du 28 septembre 2009. Cet événement a servi de cadre pour rappeler la douleur des victimes et les enjeux toujours d’actualité autour de ces événements tragiques. Les responsables de l’association ont insisté sur la nécessité de garder vivante la mémoire des atrocités commises ce jour-là tout en saluant certaines avancées judiciaires.
Une reconnaissance des efforts de la justice guinéenne
La déclaration de l’AFFV a d’abord salué les récentes condamnations prononcées contre l’ancien chef de la junte, Moussa Dadis CAMARA, et d’autres responsables militaires. « La Guinée a réussi son obligation vis-à-vis de la Communauté Internationale et en a été une bonne école pour le principe de complémentarité entre elle et la Cour Pénale Internationale » a affirmé l’association.
Cet aboutissement judiciaire est perçu comme un pas décisif vers « la fin de l’impunité dans le pays », en particulier pour les crimes contre l’humanité. En effet, souligne la déclaration, c’était la première fois que des responsables d’État et des ministres étaient jugés pour de tels crimes à portée internationale.
Une commémoration sous le signe du devoir de mémoire
En plus des condamnations, l’AFFV a souligné l’importance du devoir de mémoire pour empêcher que les atrocités du 28 septembre soient oubliées. « Cette journée doit être un rappel constant des morts, des femmes violentées, humiliées en pleine journée, des familles détruites, et des personnes handicapées à vie » ont insisté les responsables de l’association. Pour elles, cette commémoration est une manière de rendre hommage aux victimes, mais aussi de sensibiliser la société guinéenne sur les séquelles toujours présentes, comme les disparitions non résolues.
L’association a également pointé du doigt ce qu’elle considère comme une omission importante du verdict en première instance : « Un autre pan de la vérité a été occulté, celui lié à l’identification des fosses communes. » Malgré les témoignages et indices fournis par les victimes et les témoins, aucune expertise scientifique n’a été menée pour localiser ces fosses. L’AFFV appelle à ce que cette préoccupation soit prise en compte dans les prochains recours judiciaires, afin que les familles puissent enfin faire le deuil conformément aux traditions religieuses et culturelles.
La question de la sécurité des victimes en suspens
Malgré le verdict, l’association exprime des inquiétudes persistantes quant à la sécurité des victimes. En effet, celles-ci continuent de faire face à des risques et des menaces, en particulier en raison de l’évasion de certains coupables condamnés. Le cas de Jean-Claude PIVI, évadé en novembre 2023 puis capturé au Liberia en septembre 2024, illustre cette insécurité. Pour l’AFFV, cette situation « renforce nos inquiétudes d’insécurité » et soulève des questions quant à la capacité de l’État à protéger les victimes.
Des recommandations fermes pour aller de l’avant
Face à ces préoccupations, l’AFFV a formulé plusieurs recommandations, notamment l’amélioration de la sécurité des victimes et de leurs familles, l’indemnisation des victimes et l’identification des fosses communes. Elle a également exhorté les partenaires techniques et financiers à soutenir l’État guinéen dans le cadre des réparations.
L’association a conclu en réaffirmant son engagement, aux côtés des organisations de défense des droits de l’homme, à poursuivre la lutte pour la vérité et la justice : « Les victimes se battront pour que la vérité, la justice, la paix et les mécanismes de réparation priment sur la violence et l’arbitraire. »
Saa Joseph KADOUNO