Le retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la CEDEAO est désormais effectif. La Commission de la CEDEAO a publié un communiqué précisant les mesures transitoires destinées à encadrer cette rupture historique ce mercredi 29 janvier 2025. Alors que la veille, les populations des trois pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) célébraient avec faste leur sortie de l’organisation sous-régionale, la CEDEAO, malgré la séparation, joue la carte de l’apaisement en maintenant certains droits aux citoyens des pays concernés.
Loin d’une rupture brutale, la CEDEAO a choisi de privilégier une transition progressive. Le communiqué publié ce 29 janvier 2025 annonce que, bien que le départ de l’AES soit acté, des mesures sont mises en place pour éviter des perturbations dans la vie des citoyens et dans les échanges commerciaux. Parmi ces dispositions, il est prévu que les passeports et cartes d’identité des ressortissants du Burkina Faso, du Mali et du Niger portant le logo de la CEDEAO restent valides jusqu’à nouvel ordre. Une décision qui rejoint celle de l’AES, qui a annoncé la reconnaissance de ces documents en attendant la mise en circulation de ses propres passeports à partir de ce même jour.
Sur le plan économique, la CEDEAO va « continuer à accorder aux biens et services provenant des trois pays concernés le traitement prévu par le Schéma de libéralisation des échanges (SLEC) et la Politique d’investissement de la CEDEAO ».
En clair, les exportations du Burkina Faso, du Mali et du Niger vers les autres États membres continueront d’être exemptées de droits de douane, au moins pour la période transitoire. Un geste qui vise à éviter une rupture brutale des chaînes d’approvisionnement et à protéger les intérêts des opérateurs économiques.
Maintien de la libre circulation et du droit d’établissement
L’une des préoccupations majeures après l’annonce du retrait concernait la mobilité des citoyens de l’AES. La CEDEAO a décidé de maintenir, jusqu’à nouvel ordre, le droit de circulation, de résidence et d’établissement des ressortissants de ces pays dans l’espace communautaire, sans nécessité de visa. Tout comme pour les documents de voyage, l’AES a pris une initiative similaire en déclarant son « espace sans visa » pour tous les ressortissants de la CEDEAO.
En ce qui concerne les fonctionnaires des trois pays occupant des postes au sein des institutions de la CEDEAO, le communiqué précise que leur travail ne sera pas immédiatement remis en cause. La Commission a décidé d’« apporter aux fonctionnaires de la CEDEAO des trois pays, un soutien et une coopération sans faille dans le cadre de leurs missions pour la Communauté ».
Il importe de souligner que les trois pays ne reconnaissent plus ces fonctionnaires qui, selon eux, ne les ont pas doté de mandats.
Lire aussi : Pourquoi l’AES met ses armées en « état d’alerte maximale » ?
Vers une redéfinition des relations entre l’AES et la CEDEAO
Si ces mesures temporaires permettent d’assurer une transition en douceur, la CEDEAO ne ferme pas la porte à un éventuel dialogue avec les autorités des pays de l’AES. La Commission indique avoir mis en place une structure dédiée aux discussions afin de définir les futures relations entre les deux blocs. « La Commission a mis en place une structure pour faciliter les discussions sur ces modalités avec chacun des trois pays. Ce message est nécessaire pour éviter toute confusion et toutes perturbations dans la vie et les affaires de nos populations pendant cette période de transition », précise le communiqué.
La rédaction
Toutefois, cette approche conciliante de la CEDEAO ne masque pas les tensions politiques et institutionnelles qui ont conduit à cette séparation. Les autorités de l’AES dénonçaient depuis plusieurs mois une organisation jugée inféodée aux intérêts occidentaux et peu réactive aux enjeux sécuritaires du Sahel. De leur côté, les chefs d’État de la CEDEAO avaient tenté d’ouvrir un dialogue avant de finalement acter le départ des trois pays.
Avec la création de passeports propres à l’AES et la volonté affirmée de renforcer leur autonomie, le Burkina Faso, le Mali et le Niger s’orientent désormais vers une coopération plus étroite entre eux, tout en se détachant progressivement du cadre institutionnel de la CEDEAO. L’avenir des relations entre les deux entités dépendra des négociations à venir et de la volonté des dirigeants de préserver les liens économiques et humains tissés depuis plusieurs décennies.