Dans un précédent article, nous vous avons annoncé la saisine de la Cour de justice de la CEDEAO par le collectif d’avocats de Mamadou Aliou Bah, leader du parti MODEL. L’annonce a été officiellement faite par un de ses avocats, Me Pépé Antoine LAMAH au cours d’une conférence de presse animée ce jeudi 13 février 2015 à Conakry. Lors de cette rencontre, l’avocat au barreau de Guinée a expliqué le motif de cette démarche juxtaposée à celle entreprise devant la Cour d’appel de Conakry dans le même dossier.
Selon Me Pépé Antoine LAMAH, « plusieurs droits fondamentaux de monsieur Mamadou Aliou BAH ont été violés ». Il pointe notamment la violation de son droit à la liberté individuelle, un droit protégé par plusieurs textes internationaux, dont la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et le Pacte international des droits civils et politiques.
Me LAMAH rappelle qu’Aliou BAH a été empêché de quitter le territoire guinéen à la frontière guinéo-léonaise, sans qu’aucune décision administrative ou judiciaire ne le justifie. « En tant que citoyen de la CEDEAO, il est libre de circuler dans tous les États membres. Pourquoi lui a-t-on interdit de sortir du pays ? » s’interroge l’avocat, dénonçant une restriction arbitraire.
Le collectif d’avocats souligne que leur client a été interpellé et conduit de Pamlap à la Direction centrale des Investigations judiciaires de la gendarmerie nationale sans qu’aucune notification officielle des charges retenues contre lui ne lui soit communiquée. « En droit, vous ne pouvez pas priver une personne de sa liberté, même pour une seconde, sans lui notifier le motif de cette mesure privative », insiste Me LAMAH.
Pire encore, le placement en garde à vue d’Aliou BAH aurait été prolongé sans la production des documents légaux requis, notamment le procès-verbal de placement en garde à vue et la réquisition écrite du procureur de la République. « …on nous a verbalement dit à la Direction centrale des investigations judiciaires que Monsieur Mamadou Aliou BAH était placé en garde à vue. On nous a aussi ajouté que sa garde à vue a été prorogée suivant réquisition du procureur de la République près le tribunal de première instance de Kaloum. Mais après défèrement du dossier au niveau de ce parquet, nous avons constaté l’absence au dossier de la procédure du procès verbal de placement en garde à vue et une réquisition écrite aux fins de la garde à vue », a-t-il révélé.
Une détention à caractère politique

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Pour les avocats, l’incarcération d’Aliou BAH ne repose pas sur une infraction pénale, mais plutôt sur ses prises de position critiques à l’égard de la gestion de la transition. « Il est en prison parce qu’il a eu le courage d’exprimer son opinion sur la gestion de l’État. En droit international des droits de l’homme, une détention motivée par l’exercice d’une liberté fondamentale est qualifiée d’arbitraire », affirme Me LAMAH.
Des conditions de détention « inhumaines »
Outre ces violations, le collectif d’avocats dénonce les conditions de détention de leur client à la Direction des Investigations judiciaires de la Gendarmerie nationale. « Monsieur BAH a été retenu dans des conditions inhumaines : une cellule infestée de moustiques, sans lit ni matelas, où il dormait à même le sol sur une simple natte », décrit Me LAMAH.
L’avocat révèle également un épisode troublant : « Dans la nuit du 27 décembre 2024, six hommes encagoulés ont fait irruption dans sa cellule, l’ont fouillé, ont inspecté son sac et lui ont retiré sa bague de mariage. » Une situation que le collectif qualifie de « traitement inhumain et dégradant ».
Face à ces éléments, la défense d’Aliou BAH demande à la Cour de justice de la CEDEAO de constater ces violations et d’ordonner la libération immédiate de leur client. « Nous avons saisi la Cour pour qu’elle enjoigne l’État guinéen à respecter ses engagements internationaux en matière de droits de l’homme », conclut Me LAMAH.
Entre le recours à la Cour d’appel et la plainte a la CEDEAO, l’attente est grande pour Aliou BAH, ses avocats, sa famille biologique et politique.
À suivre…!
Saa Joseph KADOUNO