Dans le cadre du mois de mars, dédié aux droits des femmes, Guineepanorama s’est immergé au marché de Sonfonia, en banlieue de Conakry, pour mettre en lumière la combativité des vendeuses de sauce feuille. Ces femmes, piliers économiques de leur foyer, font face à une baisse des ventes durant cette période de jeûne, mais restent déterminées à subvenir aux besoins de leurs familles.
Un combat quotidien pour nourrir la famille
Pour ces commerçantes, le marché de la sauce feuille représente plus qu’un simple moyen de subsistance : il est une source d’émancipation. Grâce aux revenus générés, certaines ont pu investir dans l’éducation de leurs enfants, dans l’achat de terrains ou dans l’épargne à travers les tontines. « Durant cette période de jeûne, il n’y a pas assez de vente. Toutefois, mon mari, ma mère, mon père ici à Conakry, c’est la vente de la sauce feuille. Je parviens à assurer la scolarité, les soins et la nourriture de ma famille. J’ai environ 20 bouches à nourrir. Je suis dans des tontines de 20 à 30 000 francs guinéens. C’est comme ça que je parviens à économiser pour faire face aux charges familiales. Je suis fière de mon travail car je gagne ma vie », confie Rosaline BONGONO.

Mais la réalité économique est de plus en plus dure. Adèle TOURÉ, une autre vendeuse, qui exerce cette activité depuis plus de 15 ans, témoigne : « Si ce n’est pas cette période de jeûne, je peux avoir 200 000 francs guinéens par jour. Actuellement, je passe la journée mais avoir 20 000, c’est difficile. J’ai cinq enfants. Donc si je gagne, c’est vrai j’ai besoin de me vêtir, mais je pense d’abord à chercher la nourriture pour eux. Après, je pense à leur scolarité parce que pour aller à l’école, il faut manger. »

Veuve, elle avait réussi à acheter une parcelle grâce à son commerce. Mais après le décès de son mari, elle a dû revendre son terrain faute de soutien. « C’était une obligation pour moi. Je ne pouvais pas laisser mes enfants à la maison sans aller à l’école. Tout ce que je demande Dieu, c’est qu’ils étudient bien et me remboursent demain ».
La précarité amplifiée par la conjoncture

Une autre vendeuse partage son désarroi : « Actuellement, la sauce feuille est en abondance. Tout le monde crie : « pas d’argent, pas d’argent ». Nous faisons moins de ventes en cette période. Depuis ce matin à 6 heures, je n’ai vendu que 15 000 francs. Il est midi comme ça. Malgré tout, je suis obligée de venir tous les jours car il n’y a pas d’autres issues. Un de mes enfants a été renvoyé de l’école aujourd’hui par manque des frais de scolarité. Tout ça parce que je ne vends pas comme avant. Si je vends beaucoup, je parviens à gérer tout ça. Je suis dans des tontines de cinq à 10 000 francs. J’ai perdu mon mari au mois de janvier passé ici même à Conakry », a confié Sia.
Ainsi, ces vendeuses de sauce feuille incarnent la résilience, la détermination et l’ingéniosité face aux défis quotidiens. Cependant, la précarité reste une menace constante, surtout en cette période de jeûne.
Saa Joseph KADOUNO