Nous vous présentons la fiche de l’arrêt rendu par la Cour suprême dans l’affaire domaniale qui oppose Monsieur Sidya Touré à l’Etat guinéen. Cette fiche ne comporte aucun commentaire. (Le commentaire fera l’objet d’un autre article). Elle vous permet uniquement de mieux comprendre l’arrêt rendu par la Haute juridiction.
C’est parti,
Monsieur Sidya Touré a saisi le tribunal de première instance de Dixinn pour revendiquer sa propriété sur une parcelle qui lui a été attribuée par un décret du président Lansana Conté. Avant de discuter du bien-fondé de cette prétention, l’Agent judiciaire de l’Etat a demandé à la juridiction d’instance « un renvoi préjudiciel » à la Cour suprême afin que cette Haute juridiction puisse statuer sur la légalité du décret dont se prévaut M. Sidya Touré. Le tribunal a accédé à cette demande en ordonnant le sursis à statuer et le renvoie de la cause et des parties devant la Cour suprême.
A la Cour, l’Agent judiciaire de l’Etat a introduit une requête incidente prétendant l’annulation du décret du président Conté ayant attribué la parcelle à Monsieur Sidya Touré. Selon le représentant de l’Etat, ce décret n’étant pas précédé d’une mesure de déclassement, a violé les articles 101 et 113 du code foncier et domanial. Il soutient qu’à défaut de déclassement de la parcelle du domaine public pour la faire entrer dans le domaine privé, le décret doit être annulé.
En réplique, M. Sidya Touré a sollicité de la Cour de déclarer :
– L’irrecevabilité de la requête en annulation du décret pour non-respect du délai ;
– Constater que le renvoi préjudiciel fondé sur l’article 113 du code foncier et domanial manque de base légale ;
– Constater que l’immeuble à lui vendu relève du domaine privé qui ne nécessite pas un déclassement.
Le décret ayant attribué la parcelle à M. Sidya Touré est-il légal ?
C’était l’objet du renvoi préjudiciel ordonné par le TPI de Dixiin. Ainsi, il s’agissait uniquement pour la Cour d’apprécier la légalité du décret, et non l’annuler qui relève d’un REP. Dans son arrêt, la Cour a démontré que la parcelle attribuée à Monsieur Sidya Touré relevait du domaine public. Elle soutient que le décret d’attribution n’ayant pas été précédé d’un décret de déclassement, comme indiqué par les articles 101 et 113 du code foncier et domanial, viole la loi, donc illégal.
Par ailleurs, sur la requête de l’AJE visant l’annulation du décret du général Conté, la Cour suprême a déclaré l’irrecevabilité. Elle considère que cette requête tend à un REP qui « est un moyen de protection du citoyen contre l’administration, des libertés contre l’autorité et du droit contre l’arbitraire ».
Conformément à l’article 88 de la 003, la Haute juridiction rappelle que le REP est ouvert pour les administrés pour leur protection contre les décisions de l’autorité administrative pouvant leur causer des préjudices. Donc l’Agent judiciaire représentant l’Etat ne peut exercer ce recours. La Cour rappelle que le décret attaqué par l’AJE est un acte de l’autorité administrative, qu’il appartient à cette même autorité de le rapporter, si elle estime que son acte est illégal.
Kalil Camara, Juriste