Accusé de viol sur mineure, suivi d’interruption volontaire de grossesse, l’imam Nouhou avait été placé sous mandat de dépôt à la maison centrale de Conakry. Quelques jours plus tard, il a été libéré, ce qui choque la partie plaignante, qui dénonce un possible cas de corruption.
Alors qu’il était inculpé et en détention en attendant son procès, Imam Nouhou serait désormais libre, selon des enregistrements audio que nous détenons. Dans ces fichiers sonores, on entend Elhadj Nouhou, fondateur d’une école à Wanidara, remercier la justice et ses soutiens. Pendant ce temps, ses co-accusés demeurent en prison. Interrogé ce lundi 4 novembre 2024, l’oncle de la jeune victime de viol relate les événements avec désolation.
« Notre fille a fait un avortement et nous a dit que c’est le vieux, Elhadj Nouhou. Nous lui avons demandé des preuves. Elle nous a présenté des audios échangés avec lui. Le médecin qui a pratiqué l’avortement a été arrêté, ainsi que le gérant du motel où Elhadj Nouhou amenait la fille. Le tribunal de Dixinn les a inculpés et ils ont été placés sous mandat de dépôt. Cela s’est passé le 23 octobre. Lundi dernier, on m’a demandé de déposer les preuves à la Cour d’appel de Conakry. Après avoir déposé les dossiers là-bas, j’ai vu sa femme, son directeur d’école et son avocat. Dans la soirée, j’ai appris qu’il avait été libéré. Quand j’ai voulu récupérer les dossiers, ils m’ont refusé, disant qu’ils n’avaient pas confronté les parties, alors que l’inculpation venait du TPI de Dixinn », raconte-t-il.
Inquiet pour la santé de sa nièce, Tidjane SOW, accompagné de la famille, est retourné voir l’accusé pour lui demander de prendre en charge les soins de la jeune fille, qui a subi plusieurs interventions chirurgicales sans succès. Bien qu’un engagement ait été pris, celui-ci n’aurait jamais été respecté, selon ses propos.
« Le lendemain, j’ai entendu des audios où il remerciait la justice et ses soutiens. Nous sommes retournés le voir, mais il a demandé aux sages du quartier d’amener la fille dans une clinique, affirmant qu’il prendrait en charge les frais. Nous avons accepté car la santé de la fille nous préoccupe. Mais trois jours plus tard, la clinique nous a rejetés en disant que les factures n’étaient pas réglées. C’est ensuite qu’une dame non identifiée a fait transférer la fille à l’hôpital Donka, à sa charge », mentionne-t-il.
Connu pour sa fortune, l’accusé de viol ne se limite pas au domaine de l’éducation ; il est également actif dans l’immobilier, selon nos sources. Tidjane SOW affirme qu’il aurait utilisé son influence pour soudoyer Fallou DOUMBOUYA.
« J’ai appris qu’on lui avait demandé 500 millions pour sa libération. Mais il aurait payé 350 millions à un certain juge, Fallou DOUMBOUYA. Elhadj Nouhou est quelqu’un de très influent, d’abord en tant qu’imam, mais aussi par ses moyens financiers. La preuve : le médecin et le gérant du motel sont toujours en détention. Nous demandons qu’il retourne en prison en attendant le procès », accuse-t-il.
Article similaire : Médias : un journaliste accuse le procureur général d’avoir organisé son kidnapping
L’établissement sous verrou
En signe de protestation, les parents de la jeune filles ont très tôt investi lundi, 4 novembre 2024, la cour de l’école portant le nom de l’accusé, en signe de protestation. « Nous nous sommes lèvés très tôt ce matin pour aller à l’école où etudiait la fille. On a dit aux responsables qu’on est venu pour le cas Elhadj Nouhou et notre fille. On leur a dit que comme pour le moment il n’y aucune décision de justice pour nous situer donc on demande aux enfants de rentrer et c’est en guise de soutien. Et c’est ce qui a été fait malgré quelques petites difficultés. Nous demandons donc tous à soutenir ce combat. Parce que c’est la sécurité de nos enfants. L’école doit être fermée jusqu’au retour de limam en prison. Et s’il s’en tête à rouvrir l’école, ça veut dire que demain sera pire. L’imam doit retourner en prison pour retrouver le médecin et le gérant du motel. On s’adresse au DCE qui vient de marquer sa solidarité à nous ».
La crainte d’un second M’mah SYLLA
Il y a deux ans, une jeune dame du nom de M’mah SYLLA est décédé dans des circonstances similaires. Après avoir contracté une grossesse non désirée, l’auteur, qui se trouvait être un médecin, a tenté de la faire avorter sans succès, après plusieurs interventions chirurgicales en Guinée et en Tunisie. Tidjane SOW craint que sa nièce subisse le même sort. « Tous les Guinéens ont été choqués pour le cas de M’mah SYLLA – On risque d’avoir un second M’mah SYLLA« , a-t-il déclaré d’un air inquiet.
Pour équilibrer les faits, nous nous sommes rendus au domicile de l’accusé, Elhadj Nouhou, mais le portail était cadenassé. Nous avons également tenté de le joindre par téléphone, sans succès.
Mamadou Mouctar SYLLA