A N’Zérékoré, au sud-est du pays, la finale d’un tournoi de football doté du trophée « Général Mamadi DOUMBOUYA » a dégénéré dans les dernières minutes. Dans un pays où celui qui a interdit des manifestations de soutien en sa faveur à sa prise de pouvoir en est finalement le parrain, il est difficile de mettre l’action publique en mouvement pour faire la lumière sur ce drame selon le Juriste Kalil CAMARA.
Le gouvernement guinéen fait état d’un bilan provisoire de 56 morts à N’Zérékoré, dans le sud-est de la Guinée, après ce mouvement de foule au stade de la ville. En réalité, l’action publique mérite d’être déclenchée pour situer les responsabilités dans cette affaire, sachant bien que les manifestations de soutien sous le CNRD entrent dans le champ pénal, a expliqué le Juriste.
« Pour la répression, il faut se référer aux articles 621 et suivant du code pénal, ces dispositions prévoient les peines pour les attroupements illicites. Et, lorsque les manifestations sont interdites, tout attroupements, toute organisation dans le sens, bien sûr des manifestations, constitue un attroupement illicite et illégal. Donc, il faut considérer qu’actuellement les manifestations de soutien entrent dans le champ pénal, notamment des attroupements illicites ou illégaux. Et, il appartient bien sûr au procureur qui déclenche les actions publiques, lorsqu’il s’agit des manifestations qui dénoncent la mauvaise gouvernance qui ne sont pas favorables aux autorités, de déclencher des actions contre les organisateurs des manifestations de soutien », a-t-il expliqué.
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Toutefois, la répression risque de n’avoir jamais lieu, sachant que le CNRD qui a lui-même interdit toute manifestation en sa faveur et défaveur au départ, est finalement le parrain dans plusieurs manifestations de soutien notamment celui de N’Zérékoré qui a entraîné des cas de morts. « Mais vous savez qu’il est difficile de mettre l’action publique en mouvement quand l’autorité de la décision d’interdiction des manifestations de soutien en est le parrain », analyse Kalil CAMARA.
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L’État face à ses contradictions
Dans un contexte où l’interdiction des manifestations semble s’appliquer à géométrie variable, le drame de N’Zérékoré met en lumière une contradiction troublante : un État qui se présente comme garant de l’ordre public, tout en cautionnant implicitement des événements dont il est le parrain. Selon le juriste Kalil CAMARA, la légitimité de l’action publique est mise à mal lorsqu’il s’agit de confronter des responsabilités qui pourraient remonter jusqu’à ses propres promoteurs. À N’Zérékoré, au-delà des morts, c’est la crédibilité des institutions qui se trouve sur le banc des accusés.
Tamba Justin LÉNO