Le 29 octobre, le rapport final de l’évaluation des partis politiques a marqué un tournant pour le paysage politique guinéen. Ce document, publié par le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation (MATD), a entraîné la dissolution de 53 partis, la suspension de 54 autres et la mise « sous surveillance » de 67 autres dont l’UFDG, principal parti d’opposition en Guinée, et le RPG, ancien parti au pouvoir.
La décision du MATD survient alors que la junte au pouvoir prévoit d’organiser des élections nationales en 2025, dans un contexte où elle tente de restructurer le système politique en vue d’un retour à l’ordre constitutionnel. La justification donnée par Djenabou TOURÉ, responsable des affaires politiques au sein du MATD, repose sur plusieurs manquements observés au sein de certains partis : gestion opaque des finances avec des comptes bancaires au nom de leaders, structure exécutive dominée par des membres de la communauté ethnique du dirigeant, et nominations familiales préférentielles une fois le parti au pouvoir.
Cette position suscite des interrogations sur la cohérence et l’impartialité des critères appliqués. Djenabou TOURÉ, qui dénonce aujourd’hui ces pratiques, occupait également un poste clé (Cheffe de Département Fichier électoral de la CENI) sous le régime d’Alpha CONDÉ, au moment où des élections controversées étaient organisées et où des pratiques similaires étaient souvent évoquées. Elle aurait certainement dû, ne serait-ce que faire des propositions dans ce sens. Ses justifications soulèvent ainsi des questions quant à l’objectivité de l’évaluation et la portée réelle de cette restructuration, particulièrement à l’approche des échéances électorales de 2025.
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Quelles conséquences pour les deux partis à l’orée des élections ?
La mise en observation du RPG (Rassemblement du Peuple de Guinée) et de l’UFDG (Union des Forces Démocratiques de Guinée) par le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation (MATD) pour une période de trois mois pourrait avoir des conséquences significatives sur le paysage politique guinéen à l’approche des élections.
• Affaiblissement de l’influence politique : Les deux partis, étant sous observation, pourraient voir leur influence diminuer. Cela peut limiter leur capacité à organiser des événements publics, à mobiliser leurs bases électorales et à engager des campagnes de terrain, éléments cruciaux pour convaincre les électeurs.
• Impact sur la mobilisation des militant(e)s et des artisans : avec cette mise sous surveillance, les militants et sympathisants pourraient se retrouver dans l’incertitude. Cela pourrait créer une démobilisation partielle ou une perte de confiance, affectant leur engagement à soutenir les campagnes électorales à venir.
• Restrictions financières et logistiques : une observation par le MATD pourrait s’accompagner de restrictions administratives ou financières, limitant les ressources disponibles pour leurs activités. Les deux partis pourraient avoir des difficultés à obtenir des financements ou des autorisations pour leurs rassemblements.
• Renforcement des partis alternatifs : L’affaiblissement de ces deux poids lourds pourrait ouvrir des opportunités pour d’autres partis, moins populaires, de se faire connaître. Des mouvements émergents notamment de soutien à l’éventuelle candidature de Mamadi DOUMBOUYA pourraient tirer parti de cette situation pour attirer des électeurs qui se sentiraient moins liés aux grandes formations politiques.
• Impact sur le processus électoral : le MATD pourrait utiliser les conclusions de cette période d’observation pour recommander des sanctions supplémentaires, qui pourraient aller jusqu’à une suspension temporaire. Cela compromettrait sérieusement les chances des deux partis de participer activement aux élections.
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Bref, cette mise sous observation place le RPG et l’UFDG dans une position de vulnérabilité. Les dirigeants de ces partis devront faire preuve de stratégie pour maintenir leur base mobilisée et se préparer à d’éventuelles répercussions administratives à l’approche des échéances électorales.