La Guinée est plongée dans une crise profonde, l’une des plus graves de son histoire. Les institutions républicaines sont affaiblies, l’exclusion politique est criante, les droits et libertés fondamentaux sont violés, les médias sont muselés et les manifestations sont réprimées dans le sang. L’impunité dont jouissent certains membres des forces de défense et de sécurité, qui semblent s’acharner à verser le sang des jeunes Guinéens, est révoltante. L’histoire semble se répéter, comme si les tragédies du passé n’avaient laissé aucune trace.
La transition militaire du CNDD et les dérives du régime précédent auraient dû nous servir de leçon. Pourtant, aujourd’hui encore, des voix s’élèvent pour bafouer les articles 46, 55 et 65 de la charte de la transition qui interdisent formellement au président et aux membres du CNRD de se présenter aux élections. La justice, garante du respect des lois, ferme les yeux sur ces menaces contre la stabilité du pays. Parallèlement, la répression s’abat avec une violence inouïe sur les opposants politiques et les activistes qui dénoncent l’injustice : enlèvements, détentions arbitraires, harcèlement judiciaire sont leur lot quotidien. Leur seul crime ? Dire NON à la répétition des erreurs qui ont déjà plongé la Guinée dans le chaos.
L’hypocrisie du CNRD et de ses soutiens est flagrante. Le droit de manifester est systématiquement refusé aux opposants, tandis que les partisans du régime, financés par des fonds publics, paradent librement dans tout le pays. Ceux qui prétendaient vouloir en finir avec le culte de la personnalité l’érigent désormais en système : Kaloum est jonchée d’effigies de Mamadi Doumbouya, comme pour tourner en dérision le décret interdisant ces pratiques. Les nominations dans l’administration publique sont guidées par le népotisme, l’ethnicisme et la propagande.
Pendant ce temps, le peuple souffre. Le coût de la vie flambe, le chômage des jeunes bat des records et l’immigration clandestine apparaît comme l’unique horizon pour une jeunesse désespérée. En trois ans, plus de 32 000 jeunes ont fui la Guinée, au péril de leur vie, à travers le désert et la Méditerranée. Le pays est devenu le premier d’Afrique et le troisième au monde en nombre de demandes d’asile en France, devançant même des nations en guerre. Aux États-Unis, 1 857 Guinéens sont aujourd’hui menacés d’expulsion par les nouvelles autorités américaines. Une humiliation pour un pays pourtant riche en ressources, mais condamné par une gouvernance médiocre, chaotique et irresponsable.
À vous, jeunes contraints à l’exil, n’ayez aucune honte. Ce n’est pas vous qui avez échoué, mais ceux qui ont pris le pouvoir sans jamais l’exercer pour le bien du peuple. La honte leur revient de droit. Mamadi Doumbouya connaît bien la Guinée. Il sait que les opportunistes qui l’entourent aujourd’hui sont les mêmes qui, depuis toujours, minent le pays. S’il se laisse entraîner dans cette mascarade, il devra rendre des comptes devant l’histoire, car la Guinée s’enfonce chaque jour un peu plus vers l’abîme.
Il est encore temps d’avoir pitié de cette nation et de rendre aux Guinéens le droit de rêver à un avenir meilleur. Car ce que nous vivons aujourd’hui n’est qu’un triste remake… et nous savons tous comment cela finit.
Souleymane Souza KONATÉ, Président de la Commission Communication de l’ANAD et Conseiller chargé de Communication de Cellou Dalein Diallo.