« Paris est une fête », à l’heure du passage de relais entre Paris et Los Angeles, hôte des JO 2028, l’expression, rendue célèbre par l’écrivain américain Ernest Hemingway, n’a jamais pas paru aussi vraie que durant ces dix-sept derniers jours. Au moment de dresser le bilan de ces Jeux de Paris, en attendant les Paralympiques (du 28 août au 8 septembre), le président du Comité d’organisation des Jeux olympiques, Tony Estanguet et son équipe, pourront apposer l’étiquette « réussite » sur cette quinzaine.
Une organisation (presque) sans faille
Lancés quelques jours après des élections législatives tendues, ces Jeux pouvaient faire craindre le pire. La tension sociale était l’une des craintes des organisateurs, au moment où les Parisiens et/ou les Français avaient le transport et la sécurité comme principales sources d’inquiétudes.
À l’arrivée, malgré le sabotage des lignes de la SNCF à quelques heures de la cérémonie d’ouverture, les transports franciliens ont été au rendez-vous, à tel point que certains osent avancer un « sans-faute ». Des trains et des métros suffisants et à l’heure, agents présents et disponibles, une quasi-fluidité du trafic avec 4 millions de voyageurs quotidiens, il fallait le vivre pour le croire dans une capitale où les transports sont tous les jours décriés.
La crainte des attentats ou des incivilités était également présente avant le coup d’envoi des JO, mais aucun incident majeur n’a été relevé ou a fait la une des journaux. Toutefois, les vols violents ont augmenté de +17% sur la semaine du 29 juillet au 4 août, selon les données du ministère de l’Intérieur. Avec la présence de 35 000 policiers et gendarmes, plus 18 000 militaires mobilisés, sans compter l’aide d’agents étrangers, le pari de la sécurité a été gagné.
Public enamouré, sportifs conquis
La fièvre ! En termes de chaleur, de décibels, les supporters ont été présents, et les sportifs français ont vibré avec leur public. Partout, sur tous les sites, les supporters ont joué leur rôle pour pousser les athlètes à se surpasser. De la défense à Villepinte en passant par Bercy ou Saint-Quentin en Yvelines, les mots qui revenaient des sportifs étaient souvent : « On n’avait jamais vu ça ». Si le foot et le basket ont l’habitude de connaître cette ferveur populaire, d’autres sports ont pu profiter de la lumière. « C’est impressionnant et ça fait vraiment plaisir de voir qu’il y a autant de monde qui vient pour voir du handball féminin, on se bat pour ça depuis des années », a notamment confié, à Lille, Laura Flippes, arrière droite des Bleues. Que dire du tennis de table qui n’a jamais connu autant d’engouement, de suiveurs et de supporters avec les frères Lebrun. La Marseillaise a retenti des centaines de fois sur tous les sites appelant à la communion et à des retrouvailles après des législatives qui avaient fini de diviser les Français.
Des records, en veux-tu, en voilà…
C’était parti vite et fort, avec la Coréenne Lim Si-hyeon qui bat le record du monde en tir à l’arc, à 70 mètres, dans un round de 72 flèches, avant même la cérémonie d’ouverture des JO. Dans pratiquement toutes les disciplines, des records olympiques sont tombés. Les records du monde les plus marquants ; celui du 1500m nage libre effacé par l’Américain Bobby Finke, 14min 30 s 67 contre 14 min 31 s 02 du Chinois Sun Yang, le 400m haies avalées par l’Américaine Sydney McLaughlin-Levrone (50 s 37) ou les 6,25m d’Armand Duplantis au concours de saut à la perche.
Il ne faut pas oublier l’immense performance du lutteur cubain Mijain Lopez devenu le premier athlète tous sports confondus à remporter un cinquième titre olympique dans la même discipline lors de cinq éditions différentes des JO. Du côté des nations, il y a évidemment la belle moisson de la France qui a battu son propre record de médailles d’or (16) sur une édition des Jeux olympiques. Les 15 titres de références décrochés à Atlanta en 1996 ne tiennent plus depuis la victoire d’Althéa Laurin en taekwondo samedi 10 août. Au tableau des médailles, la France a terminé avec 64 breloques au total dont 26 en argent et 22 en bronze.
Des émotions, des larmes, de la fusion
Des images fortes, des émotions décuplées ont animé ces JO. Novak Djokovic a (presque) tout gagné, mais quand il remporte la balle de match face à Carlos Alcaraz, il s’effondre à genoux, en larmes, la tête entre les mains, avant de monter dans les tribunes et de prendre sa fille dans les bras, sous l’ovation du public. Les larmes de joies étaient aussi pour Pauline Ferrand-Prévot qui a connu trois terribles échecs avant la consécration olympique. Des pleurs de tristesse pour la Marocaine Khadija Mardi, favorite en boxe, en détresse après sa défaite. « Je suis désolé pour le peuple marocain et pour le Roi de n’avoir pas pu ramener cette médaille. Je demande pardon à mon mari, mon père, ma mère, ma famille ». Que dire de la force et de l’énergie qu’il a fallu au boxeur samoan Ato Plodzicki-Faoagali, qui monte sur le ring deux jours après que son entraîneur soit décédé sous ses yeux…
Les émotions sont passées aussi dans l’hystérie collective, comme une symbiose entre les athlètes et leurs supporters. Cela commence par le rugby à 7, avec Antoine Dupont, sacré au Stade de France, un Léon Marchand qui électrise l’Arena la Défense, des basketteurs hommes, comme filles qui font monter le tensiomètre malgré des défaites magnifiques et des Bleus du volley en apesanteur avec le public comme jamais.
Et au milieu coulent les polémiques…
Évidemment, tout n’a pas été rose pour ces JO et les polémiques n’ont pas manqué. Jusqu’au début des Jeux, des associations ont beaucoup dénoncé le « rythme effréné des expulsions » de personnes envoyées loin de la capitale. « Ils (les autorités) ont vraiment parachevé le grand nettoyage social juste avant le commencement des JO », avait commenté Paul Alauzy, coordinateur de Médecins du monde. Le collectif « Le revers de la médaille », qui rassemble plus de 100 organisations, pointera le chiffre de +38,5%, équivalent à l’augmentation du nombre de personnes expulsées, principalement des migrants, en Île-de-France en un an, entre avril 2023 et mai 2024.
Avant et pendant les JO, l’eau de la Seine a beaucoup alimenté également la rubrique polémique, crispant autant les organisateurs que les athlètes. Des entraînements de triathlon et natation en eau libre annulés, le triathlon masculin repoussé, l’incertitude a longtemps demeuré, mais toutes les épreuves ont pu avoir lieu. Restent les plaintes de certains athlètes. « Si la priorité était la santé des athlètes, alors cette course aurait été transférée depuis longtemps sur un autre site. Nous ne sommes que des marionnettes », s’était indigné le triathlète belge Marten van Riel.
Indignation et critiques de toutes parts après la polémique sur la boxeuse Imane Khelif. L’Algérienne, présente à Tokyo où sa participation n’avait suscité aucune polémique, s’est retrouvée malgré elle à Paris au centre d’une controverse sur le genre. Sa meilleure réponse a été cette médaille d’or sur son cou.
RFI