La nomination de l’ancien Directeur Général de la Police Nationale, Ansoumane Camara, dit Bafoé, comme ambassadeur de la Guinée en Guinée-Équatoriale par le président de la transition, Mamadi DOUMBOUYA, suscite de vives réactions. Cette décision intervient alors que Bafoé figure parmi les personnalités que l’ancien ministre de la Justice, Charles WRIGHT, avait instruit de poursuivre pour des crimes de sang sous le régime d’Alpha CONDÉ, marqués par la mort de centaines de personnes lors de manifestations. Dans un entretien téléphonique accordé à Guineepanorama.com ce jeudi 26 décembre 2024, le juriste Kalil CAMARA décrypté cette situation complexe, soulignant les zones d’ombre autour de la procédure judiciaire.
Le cadre juridique
Selon Kalil CAMARA, il est primordial de déterminer si Bafoé a fait l’objet d’une inculpation formelle dans le cadre des crimes qui lui sont reprochés. « Il est difficile de répondre directement à cette question. Parce qu’il faut savoir si la personne dont elle est question a été inculpée ou pas. Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que la procédure judiciaire, notamment dans la procédure pénale, il y a des phases préliminaires. La phase préliminaire se passe au niveau de la police judiciaire qui sont les commissariats et les gendarmeries. À Conakry, nous avons la direction centrale de la police judiciaire. Donc, lorsqu’une personne est suspecte – c’est lorqu’il existe des faits plausibles qu’elle a commis ou qu’elle a tenté de commettre des infractions. Donc, lorsqu’une personne est suspecte, elle peut être interpellée au niveau [par] la police judiciaire. La Police judiciaire verra sir les faits qui lui sont reprochés sont fondés ou il y a une raison plausible de croire que cette personne est responsable de ces faits. [Dans ce cas], la police judiciaire peut, soit placer la personne en garde à vue et informer directement, c’est ce que dit la loi, le procureur de la République. Le procureur de la République verra à son tour si la personne peut être poursuivie ou pas. Si le procureur décide de poursuivre la personne, il a plusieurs possibilités. Il y a d’abord la procédure de flagrance, c’est-à-dire le procureur décide présenter la personne directement au tribunal sans passer par une information judiciaire. Mais en matière de crime, l’information judiciaire est obligatoire. C’est pourquoi quand il s’agit des crimes ou des faits complexes, le procureur doit saisir le juge d’instruction afin d’ouverture d’une information judiciaire. Et au niveau du juge d’instruction, il sera question de voir, s’il y a des faits graves ou concordants contre la personne parce que la loi dit, le code de procédure pénale, que le juge d’instruction ne peut inculper que lorsqu’il ya des faits graves et concordants que la personne a participé ou a tenté de commettre l’infraction. Dans ce sens, s’il ya des faits fondés contre la personne, le juge d’instruction peut décider de la mise en examen qui peut être assortie de l’inculpation. Donc à partir de l’inculpation des restrictions peuvent être imposées à la personne : des restrictions de liberté et de droits. Il peut être interdit à la personne de sortir hors du territoire. Et généralement, le principe, quand une personne est mise en cause dans une procédure judiciaire, si elle est en fonction, elle est suspendue. Ce n’est qu’après que la question a été traitée par la justice _ que la personne peut être rétablie dans ses ses fonctions ou peut être révoquée _ Donc, c’est de voir est-ce que _ le général à la retraite Ansoumane Bafoé CAMARA, a fait l’objet d’inculpation ou pas. Le simple fait d’annoncer des poursuites, du point de vue juridique, ça n’a aucun effet. Il faut que la poursuite annoncée soit réalisée et que par la suite, il y ait des restrictions », a-t-il expliqué.
Saa Joseph KADOUNO