Le président de la Commission du Plan, des Affaires financières et du Contrôle budgétaire (CPAFCB) du Conseil National de la Transition (CNT), Hamidou CAMARA, a apporté des éclaircissements sur le Programme Simandou 2040, un projet qui suscite de nombreuses interrogations. En marge d’un panel tenu lors du Forum économique d’Émergence Magazine à Conakry, il a souligné les ambiguïtés entourant cette initiative et l’absence de cadre structuré pour sa mise en œuvre.
Un programme sans contours définis
Hamidou CAMARA a tenu à lever l’équivoque entre le projet d’exploitation du gisement de fer de Simandou et le Programme Simandou 2040, présenté comme une vision du président de la transition. Il a précisé que ce programme, souvent assimilé au projet minier, n’est ni rédigé, ni quantifié, ni valorisé à ce jour. « Nous avons eu des échanges avec le ministre du Plan. Pour le moment, c’est un programme qui n’est même pas rédigé étant donné qu’il n’est ni quantifié, ni valorisé. À date, on ne sait pas combien de projets il contient et quel sera son coût », rapporte mosaiqueguinee.
Le Programme de Référence Intérimaire (PRI) sous l’ombre du Programme Simandou 2040
Le président de la Commission du Plan a comparé la situation du Programme Simandou 2040 à celle du Programme de Référence Intérimaire (PRI), adopté le 15 décembre 2022. Ce dernier, qui devait englober 268 projets pour un coût total de 108 000 milliards de francs guinéens, n’a connu qu’une mise en œuvre partielle. « La Commission des affaires financières du CNT a fait un exercice pour se rassurer de la mise en œuvre de ce programme. Il s’est avéré que sur 268 projets prévus, seulement 62 ont été réalisés à date, soit un taux d’exécution de 23 % », a révélé Hamidou CAMARA.
Pour lui, il est essentiel d’évaluer les lacunes du PRI avant de se lancer dans un nouveau programme. « …si nous devons bâtir un nouveau projet, qu’on fasse un état des lieux du rapport de mise en œuvre du PRI, pour que nous puissions nous inspirer de ces insuffisances qui ne sont pas méconnues », a-t-il précisé.
L’une des principales raisons de l’échec du PRI, selon lui, est le manque de ressources financières. Sur les 108 000 milliards prévus, l’État guinéen devait mobiliser 70 000 milliards et obtenir 30 000 milliards auprès des bailleurs de fonds. Cependant, cette levée de fonds s’est révélée inefficace, en raison notamment des incertitudes politiques.
Des défis financiers et institutionnels majeurs
Hamidou CAMARA a aussi mis en exergue les difficultés liées à la mobilisation des fonds pour de tels programmes. Il a évoqué la table ronde des bailleurs organisée à Dubaï, où des annonces de financement à hauteur de 7 milliards de dollars ont été faites, mais où aucun financement concret n’a été obtenu à date. « Trois jours après la table ronde, le Gouvernement a été dissous. Si un Gouvernement est dissous 72 heures après une table ronde de mobilisation de fonds, cela pousse les bailleurs de fonds à se rétracter », a-t-il expliqué.
Par ailleurs, il a insisté sur la nécessité d’adopter une approche plus rigoureuse dans l’élaboration de tout nouveau programme. « Nous pensons qu’avant d’élaborer le Programme Simandou 2040, il existe des préalables. On ne peut pas bâtir un programme de développement autour d’un projet annuel, il faut qu’on passe au budget programme. Si vous n’avez pas de budget programme, vous ne pouvez pas bâtir un programme de développement », a-t-il martelé.
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Face à ces défis, l’analyste économique plaide pour une meilleure structuration des initiatives gouvernementales. Pour lui, il est impératif que le Programme Simandou 2040 soit rédigé de manière claire, avec une estimation précise des coûts et une stratégie de financement viable avant d’être présenté au Conseil des ministres et soumis au CNT pour adoption.
Si le projet minier de Simandou continue de captiver l’attention, le Programme Simandou 2040 demeure pour l’instant une vision sans cadre défini. Un défi que les autorités devront relever si elles veulent éviter les erreurs du passé et assurer un développement économique durable pour la Guinée.
Saa Joseph KADOUNO